Les vanités
En 2008 Frédéric Voisin visite une exposition à Bruxelles sur le thème des vanités anatomiques. Marqué par le thème, il décide d'entreprendre une série de cinq gravures sur ce thème.
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Les Vanités anatomiques de Frédéric Voisin
Une vanité est une catégorie particulière de nature morte dont la composition allégorique suggère que l'existence terrestre est vide, vaine, la vie humaine précaire et de peu d'importance. Très répandu à l'époque baroque, particulièrement aux Pays-Bas, ce thème de la vanité s'étend à des représentations picturales comprenant aussi des personnages vivants comme Les Ambassadeurs d’Holbein.
Leur titre et leur conception sont issus de la rengaine de l’Ecclésiaste, un livre de l’Ancien Testament : « Vanitas vanitatum omnia vanitas » (vanité des vanités, tout est vanité). Le terme traduit par « vanité » signifie littéralement « souffle léger, vapeur éphémère ». Il s’agit de méditer sur la nature passagère et vaine (d’où « vanité ») de la vie humaine, l’inutilité des plaisirs du monde face à la mort qui guette. C’est en même temps un élément essentiel à l’émergence de la nature morte en tant que genre.
Si la nature morte existe durant l’Antiquité, elle disparaît pendant un millénaire de la représentation picturale. Elle s’affirme comme genre à part entière au début du XVIIe siècle mais hésite longtemps entre l’exercice de style et la leçon philosophique. Dans les pays catholiques, notamment, persiste une réticence à représenter les objets pour eux-mêmes, c’est-à-dire pour la simple délectation. Auréolée d’une justification morale et religieuse la nature morte se fait vanité.
Dans les vanités, les objets représentés sont tous symboliques de la fragilité et de la brièveté de la vie, du temps qui passe, de la mort. Parmi tous ces objets symboliques, le crâne humain, symbole de la mort, est l’un des plus courants. On retrouve ce « memento mori » (souviens-toi que tu mourras) dans les symboles des activités humaines : savoir, science, richesse, plaisirs, beauté… Les vanités dénoncent la relativité de la connaissance et la vanité du genre humain soumis à la fuite du temps, à la mort.
Inspiré par cette symbolique de la mort ainsi que par les planches anatomiques de la Renaissance, Frédéric Voisin livre ici son interprétation de la vanité contemporaine.
Texte : Amélie Beaujouan.
Les trois groupes de Vanités selon l'historien d'art, Ingvar Bergström
celui-ci divise les vanités en trois groupes :
1er groupe : « il évoque la vanité des biens terrestres » Livres, instruments scientifique, art : vanité du savoir. Argent, bijoux, pièces de collection, armes, couronnes et sceptres : vanité des richesses et du pouvoir. Pipes, vin, instruments de musique et jeux : vanité des plaisirs
2ème groupe : « il évoque le caractère transitoire de la vie humaine ». Squelettes, mesure du temps, montres et sabliers, bougies, lampes à huile, fleurs séchées.
3ème groupe : « il contient les éléments qui sont les symboles de la résurrection et de la vie éternelle » : Épis de blé, couronnes de lauriers... Références à mes Vanités de la 1 à la 5 (certaines de mes vanités sont une interprétation libre sans références particulières à celles d' Ingvar Bergström : (planches n° 1 et n° 5).
Explication sur les termes « Vanités anatomique » :
Lors d'une visite à Bruxelles en 2008, je suis allé voir une exposition à la maison d'Érasme qui avait pour nom : « Anatomie des vanités » cette exposition présentait essentiellement, des sculptures, peintures, cabinets de curiosités, mais, et plus particulièrement une « Éve anatomique » enceinte datant du 17ème siècle, magnifique sculpture en bois polychrome. Chaque organes (dont le foetus) étaient représentés sous la forme de petites sculptures en ronde bosse amovibles.
J'ai eu l'idée de reprendre le titre de l'exposition en inversant les deux mots, ce qui a donné « Vanités anatomiques ». J'ai également interprété librement les différents crânes et organes qui ne correspondent pas à la réalité, tout du moins à notre réalité humaine. Il s'agit donc ici d'anatomies « extra terrestres et monstrueuses » touchant au « grotesque ».
Vanité 1 : Allégorie du mal. 34 x 48 cm linogravure imprimée sur papier Arches 300gr. Mise en couleur à la main, encres. 2008
Symboles : anneau à l'oreille droite (porté essentiellement par les pirates et écumeurs des mers) , entonnoir (souvent considéré au moyen-âge comme l'instrument de la folie menant à la méchanceté), le serpent (symbole du péché originel et très souvent attribut du diable).
Vanité 2 : Allégorie du pouvoir. 34 x 48 cm linogravure imprimée sur papier Arches 300gr. Mise en couleur à la main, encres 2008
Symbole principal : le sceptre
Autres symboles : l'œil se détachant de son orbite afin de surveiller et de régner sans partage. L'étoile filante : fugace comme les pouvoirs autoritaires.
Vanité 3 : Allégorie de la science. 34 x 48 cm linogravure imprimée sur papier Arches 300gr. Mise en couleur à la main, encres 2008
Symboles : Saturne (l'astronomie), l'œil mécanique aveugle (égarement des scientifiques dans leur recherches parfois hasardeuses).
Vanité 4 : Allégorie du temps qui passe. 34 x 48 cm linogravure imprimée sur papier Arches 300gr. Mise en couleur à la main, encres 2008
Symboles : La bougie se consumant et le sablier se vidant de sa matière.
Vanité 5 : Allégorie des biens terrestres. 34 x 48 cm linogravure imprimée sur papier Arches 300gr. Mise en couleur à la main, encres 2008
Symboles essentiellement liés à la nature que l'homme tant à vouloir constamment dominer : Tournesol toujours tourné vers le soleil, insecte lucane belliqueux par nature, arbre de vie placé sur la colonne vertébrale.